Sources : Allafrica
Directrice des pays francophones de Gender Links, Ialfine PAPISY apporte une analyse de l'environnement du genre à Madagascar et salue la décision du chef de l'État sur le dernier remaniement. Gender Links est une ONG d'Afrique australe basée à Johannesburg (Afrique du Sud) visant à s'assurer que les femmes et les hommes participent de manière équitable à la vie de la région.
On n'entend pas Gender Links ces derniers temps. Que faites-vous actuellement?
Ialfine Papisy : La pandémie de COVID-19 a certes chamboulé beaucoup de choses et les femmes sont les plus vulnérables face aux conséquences sanitaires et socioéconomiques. Mais Gender Links, une ONG internationale engagée dans la promotion des droits des femmes, poursuit toujours ses tâches. Si l'on parle de Madagascar, je tiens à vous informer qu'une étude a été menée sur les Progrès du Genre en Afrique Australe (GPS) entre janvier 2019 et mai 2021. Les principaux résultats des questions soumises auprès de 5.000 femmes et hommes montrent un score moyen de 58 % des attitudes positives du genre à Madagascar. Il y a là une amélioration progressive.
Quels sont les projets concrets en cours?
Actuellement, nous mettons en œuvre des programmes de formation des femmes sur l'entreprenariat qui existent depuis 2018. Cela se déroule en plusieurs étapes de sessions, d'abord la confiance en soi, l'étude du marché, le développement de business plan et la recherche de financement. L'année dernière, malgré le COVID -19, la Représentation de Gender Links Madagascar a accompagné 180 femmes dans différents secteurs et a financé leurs business plans. Le financement a permis aux femmes de créer des activités génératrices de revenus, d'avoir plus de ressources financières pour améliorer la vie de leurs familles.
Parlons de la parité lors du récent remaniement gouvernemental
Je voudrais rendre hommage au président de la République Andry Rajoelina pour ses initiatives en faveur du genre lors du remaniement du 15 août dernier, car il a concrétisé dans la composition du gouvernement sa confiance sur le rôle des femmes dans le développement dans les années à venir. Sur une trentaine de départements, onze ont été confiés à des femmes, c'est un progrès même si ce n'est pas encore 50/50.
Est-ce que le combat est gagné pour vous?
En tout cas, le Président a démontré ses initiatives de faire participer les femmes à travers la nomination de ces onze femmes sur trente-deux portefeuilles ministériels le 15 août dernier, soit 34% de femmes ministres. Ce qui fait qu'à cette échelle, Madagascar a atteint la masse critique de participation des femmes pour apporter des changements, bien que les 50% de la parité ne soient pas encore au rendez-vous. Nous saluons la volonté politique du président de la République et l'encourageons à aller vers la parité car nous sommes convaincus que le développement de Madagascar passe à travers la participation des femmes qui n'est pas simplement une question de chiffre. Une fois que les femmes sont à la table de décisions, elles doivent participer et apporter les problématiques des autres femmes à la table de décisions pour qu'elles puissent se transformer en politique, en stratégies, en projets et en actions pour améliorer la vie des autres femmes et de toute la famille.
Justement, qu'en est-il de la participation des femmes dans les régions?
Pour nous chez Gender Links, les femmes doivent être des actrices du changement à tous les niveaux. Pour apporter ce changement, les femmes doivent s'impliquer dans tous les secteurs, pas seulement les femmes intellectuelles et cultivées mais aussi les femmes de toutes les catégories sociales, chacune à son niveau. Je pense en particulier aux femmes dans les campagnes de Madagascar où vivent 80 % de la population qui n'aspirent qu'au développement et au progrès.
Pourriez-vous donner plus de précision?
Je précise que chaque région a sa spécificité économique à Madagascar. Les actions à entreprendre en faveur de la promotion des femmes dans l'économie doivent tenir compte des secteurs porteurs de chaque région.Par exemple, dans la Région Atsinanana, la multiplication de l'accompagnement et le soutien des femmes dans l'agriculture et le tourisme sont primordiaux, vu l'existence des sites touristiques comme Manambato et Foulpointe. Les femmes doivent être en mesure de créer des activités génératrices de revenus à travers ces secteurs porteurs. Elles doivent être capables de se former pour répondre également aux besoins du marché de leur région. Ce qui fait que les curricula des formations techniques développés par le ministère de l'Enseignement technique doivent répondre exactement aux besoins de chaque territoire, un programme spécifique pour les femmes doit être élaboré. Je persiste qu'il n'y aura pas de développement de Madagascar sans la participation des femmes.